Contre l'évidence de la série, les différences de dispositifs et d'ustensilités
Les alignements de
babioles respectent un principe d'identité partielle. Cette série
obéit à la reconnaissance du tube : cheville, tube de colle,
gaine électrique, chaussure, moule d'entremet, bigoudi, poignée,
étui à brosse à dent, tube de comprimés, briquet, buse,
cartouche. L'analyse ne s'arrête pas là ; si on se situe dans
le rapport à la différence, on peut voir des ustensilités et des
dispositifs qui opposent les bibelots. Certes la cheville est un
tube, mais c'est aussi une glissière : on peut facilement
l'enfoncer dans le trou. Le fait qu'elle peut en ressortir comme elle
est entrée montre que ce dispositif de glissage n'était pas prévu
à la construction. On notera au passage que la technique peut agir
contre le constructeur . Le tube de colle comporte du stockage
et pas seulement de la canalisation, par le métal mou un dispositif
de pression est élaboré. La gaine électrique par ses cannelures
outille la résistance et gagne en flexibilité deux effets
conjugués, en terme de matériaux, de la consolidation. La
chaussure, par son élasticité, sa mollesse, tient compte de la
déformation, autre dispositif nécessaire pour une adaptation au
pied. Le moule d'entremet, par sa paroi lisse et évasée, donne
forme au démoulage en même temps qu'elle le facilite comme
l'opercule enlevé. On peut contester la place du bigoudi dans cette
série : en quoi est-il un tube autant qu'un rouleau ? J'ai
trouvé une réponse dans le rapport au séchage : le tube est
ouvert à la ventilation. Par ailleurs le bigoudi intègre des picots
de poils qui réalisent de l'accrochage, une grille aussi qui permet
le piquage. La présence de la poignée aussi demande quelques
justifications : il suffit d'évoquer la main qui passe dans la
poignée et l'on obtient le tube : mais on voit aussi que la
manutention est outillée. Quant à l'étui de brosse à dent, il
comporte un orifice discret qui aère le conduit, évite l'humidité
résiduelle propice aux bactéries : l'aération s'ajoute à la
protection. Le tube de comprimé est fermé ou refermable,
l'obturation le différencie de l'ustensile précédent bien que la
brosse soit aussi bouchon. Le briquet demande de l'étanchéité pour
le stockage du gaz. La buse en entonnoir élabore le dosage de
l'extrusion déterminant la section du cordon de mastic. Et pour
finir la cartouche par la compression de la poudre et des plombs a
formé l'explosion.
Bref, nous sommes en
présence de quantités nombreuses et de qualités différentes, ce
qui justifierait un autre classement. C'est que les variations de
techniques mobilisées l'une ou l'autre selon l'activité en cours ou
en tête proposent des analyses différentes du même matériel. Et
c'est ce qui vous est proposé à expérimenter : la même
babiole peut se trouver plusieurs fois sur les six câbles, intégré
à des séries différentes.
7-10-17
En chantier
Nous allons essayer de
manipuler les choses telles qu'elles font. Déjà, une
contradiction : si les choses déterminent (nous imposent) la
manipulation alors, quoiqu'on fasse les choses vont faire à notre
place: elles n'en feront qu'à leur tête. J'emploie à dessein
le mot tête pour dire qu'elles peuvent être aux commandes, comme
les mots le sont lorsque je le dis, c'est à dire maintenant que je
parle. Et le placement de ce tronc, pardon, de ce « stipe »
de palmier, après sa coupe, se passe de mots, de même que cette
suspension de babioles sur ces six câbles tout autour. Je vous
invite à en faire autant, autrement dit je vous donne la main et
nous verrons comment les choses font...
Voici un tas de babioles,
des choses ouvragées jetées là comme on jette à la poubelle. Je
les ai retirées de la poubelle pour qu'on fasse attention à nos
gestes de tous les jours, mais "pas que", pour que chacun s'approprie et reconnaisse sa propre culture
technique. Car nous sommes tous techniciens, mais nous ne parlons pas
tous la même technique ; entre les techniques comme entre les
langues, il y a des frontières. Mais je parle trop : il nous
faut des facteurs : qui veut bien passer à l'action en
choisissant une première babiole ? Il aura l'avantage de la
facilité ; pour le second, il faudra faire attention, mais je
vous en direz plus une fois ce premier choix opéré...
... Le bibelot
est accroché en bas d'un des câbles. C'est une ceinture enroulée sur elle-même.
Donc, je vous donne
maintenant la consigne : il s'agit de disposer à la suite de
cette première babiole (objet usuel) une autre qui lui ressemble,
non par sa forme perçue, imaginée et conçue, non parce qu'elle
sert au même usage, mais parce qu'elle présente une façon de
faire...je vous vois hésiter : c'est en faisant qu'on se fait
facteur : il suffit de saisir un de ces objets usuels.
... Un facteur ajoute un bout de pellicule 24 x 36. et explique son choix par le critère de la couleur noire.
Je reviens sur la consigne en prenant un exemple:
Quelqu'un
prend un bouchon, il le saisit entre le pouce et
l'indexe...Vous avez vu quoi ? Une
façon de faire et plus précisément une façon de prendre qui n'était pas contrariée par le bouchon. C'est la main qui se
fait pince, le bouchon peut être pincé. Je peux également le
rouler entre mes deux mains, c'est encore possible. C'est possible de
le jeter en l'air, de caresser ma joue, de le lancer comme un
projectile, etc. Mais je ne le disposerai pas au pied du palmier pour
consolider le tronc : il ne fait pas le poids. Autrement dit,
tout n'est pas possible avec un bouchon ; il y a des choses que
je ne ferai pas parce que je me rend immédiatement compte, avant
même d'agir que ce n'est pas la peine, il n'est pas fait pour ça,
ça ne marchera pas ; entre ce qu'on veut faire et ce qui se
fait il y a un fossé. Qu'est-ce qui pourrait bien ressembler à ce
bouchon ? Je ne parle pas de la ressemblance du bouchon avec une
mouche, non le bouchon ne peut pas voler autour du palmier, sauf dans
notre imaginaire je parle
d'une façon de prendre qui m'est imposée par la chose elle-même et
qui est une utilisation possible : le bouchon n'a pas d'ailes,
vivantes ou non. Quelqu'un prend une gaine électrique en la
roulant entre ses mains. Oui, il y a du rouleau aussi dans le
câble...bon choix ! Regardez
ce que la main indique. Je vais juste prendre le câble d'une
autre façon : je le place contre mon œil en guise de lunette.
Ah ! Est-on toujours dans la même ressemblance au
bouchon...Non, vous voyez qu'on s'en éloigne et pourtant le câble
permet cette manipulation, de même que je pourrais aspirer un
liquide, du sable ou un insecte, je ne le ferai évidemment pas pour
ne pas m 'étouffer, ou parce que c'est sale, etc., mais c'est
possible, il ressemblerait alors à du tuyau, comme à ceux qui sont
là (sur le premier câble garni). Donc...suspension du câble à
côté du bouchon... il faut maintenant trouver du rouleau
ailleurs...quelqu'un s'empare d'un lance-projectile en le faisant
valoir comme un serpentin à ressort...Hum ! Ça demande
quelques justifications : où est le câble dans tout
ça ?...Attente de l'analyse orale...Certes, on peut porter son
attention à l'enroulement du ruban sur lui-même et ça nous fait
comme un rouleau de papier...D'accord ! Bon à suspendre !
1 commentaire:
J'étais sur le chantier le 15 octobre. L'important c'était la prise: comment ma main prend tel objet? Le premier à faire décide du dispositif principal montré sur tel câble. Il y a de l'accrochage, de la rotation, du dosage sachant qu'un objet peut faire partie de plusieurs dispositifs, exemple: la pipette qui ici participe du dosage et elle a été faite pour ça, pourrait être placée dans l'alignement des dispositifs de rotation en raison de celui qui la prend pour enrouler du fil.
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