jeudi 20 octobre 2022

"Le bois des rencontrés"

 

« La terre n'est pas ronde »


Bruno Latour ne voulait pas s'engager dans une forme de paradoxe scientifique et littéraire ni même jouer avec la subjectivité des uns et des autres. Il pointait par ce constat l'artificialité de la terre.

Ceci dit, j'imagine l'équipée des rencontrés arpenter le terrain avec le cicerone Gilles Bruni. Elle est évidemment immense et l'on n'a jamais fini de l'explorer. L'arpentage n'est pas directement en cause, il ne s'agit pas de la mesurer. Pourtant la première métrologie de la marche produit une grandeur de temps et d'espace. L'oeil et le savoir ont à dire, l'oreille pour tranquilliser le lièvre, le lapin ou le chevreuil – le sanglier n'en a cure il fonce – la main aussi et sans quitter le compas dans l'oeil, elle réaménage prudemment le lieu, multipliant les unités et identités de moyens et de fins à partir de celles qui sont fournies.

Au final une carte des parcours exploratoires attentive aux techniques des uns et des autres dresse le constat de la pluri-dimensions, non de l'incertitude mais de l'indéterminé sinon l'indéterminable – je pense à Étienne Klein – . Trois ce n'est pas assez, dit le scientifique en mal de mondes ; et la physique suppute quant aux quanta. On tire sur des cordes : pour l'instant, personne n'a gagné. Car chacun y va de sa technique et s'attelle à ce qu'il trouve pour chercher encore : sous la couverture des mousses, un paysage imaginé, des tailles de sapins, des récoltes de lichens pour des crèches de Noël, des graffiti, des bûcheronnages inventifs, des bains de pieds improbables, des cabanes cachettes, des champs de batailles en clairière, des « arbres parapluie », des caches animales, des « champs à lapins », des crèmes solaires, des arbres-totems, des armes de chasseur : pièges, lances, frondes, des passerelles des plans de travail, des bois jardinés, des carrières, des collines à vues...

Le bois est là et partout jusqu'à occuper les appartements. Par revanche sur des bûcherons indifférents ? Peut-être, mais surtout pour la sentir, sentir ce qu'elle produit et comment nous la reproduisons, cette forêt, au-delà du « bois des rencontrés » qui vient ainsi à nous si nous n'allons pas à lui.

Pour revoir le site naturel de Beauport avec Gilles Bruni :

https://gillesbruni-beauport.blogspot.com

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