Tout constructeur tend à produire ce qui ne peut l’être par la technique qu’il utilise, soit qu’il s’échine à finaliser un résultat pour le rendre conforme à la chose visée, soit qu’il accroît virtuellement les possibilités de son appareil : la magie fait alors le reste.
On peut rattacher à ce dernier rapport à la production la mise en place chez Mondrian d’un espace dans l’espace qui fait magiquement sortir la peinture d’elle-même en la mettant en continuité avec les murs de l’architecture : il n’y a guère dans cette autre peinture qu’un champ pictural qui impose la représentation d’un hors-champ illimité en même temps qu’un retour aux limites quadrangulaires du format. C’est dire que Mondrian ne cultivait pas cette illusion au point d’oublier ses conditions de production. Pour reprendre l’analyse de Deleuze qui procède par la lentille du « diagramme », l’espace représentatif nouveau consistant principalement dans le recours au plan ne cesse pas d’être celui de l’œil, et c’est uniquement par l’émergence du format en ses limites qu’il se trouve infléchit par celui de la main. Le chaos tempéré qui charpente l’étude de la peinture chez Deleuze procède de la prise en compte d’une nécessité matérielle et technique : le plan de l’activité qu’il dit être celui d’une vitalité non-organique. A suivre plus avant son exposé et notamment le rappel qu’il fait de Worringer et de sa ligne gothique, on comprend que ce qui est en cause, à travers la violence de la vie non-organique contre le monde de la représentation, c’est encore la recherche de l’ « autonomie de l’art », bref une approche non instrumentée de l’art pour l’appréhension de sa propre organisation. Et pour ce faire, il ne craint pas une étude pouvant paraître formaliste tant la place qu’il accorde à la peinture abstraite géométrique est grande, notamment dans l’évocation d’Auguste Herbin. Mais au bout du compte, s’amorce ici une déconstruction de la peinture.
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