lundi 23 avril 2007

Peinture et jardinage


Il est banal de se saisir du jardin comme métaphore de quiétude, de tranquillité, de bonheur, de sexe féminin, d’illusions, bref, comme support de représentations qui se passent aisément du jardinage.

Expérimenter le jardinage, c’est autre chose : confronté à la croissance végétale, le travail du jardinier n’a de cesse de tailler, d’enfouir, d’extraire pour transplanter, de tuteurer, de couvrir, d’empailler, d’arroser, de sarcler, d’ameublir, de piocher, de bêcher, de gratter, de herser, de plomber, de ratisser, de trier.

Non pour définir la peinture mais pour voir ce qu’elle devient, Benoît Sicat la place dans un jardin : la clôture est là qui lui fournit un espace de présentation. Puis il laisse faire les choses : la pluie, le vent, le soleil font évoluer cette peinture qui n’est pas faite pour durer et qui change comme ce jardin qui marche. Interaction ou interactivité : la démarche est ouverte aux interactions ; ce n’est pas de l’interactivité au sens où explicitement, par une industrie de la dynamique (l’art de réaménager la production pour plus d’efficacité : investissement dans la construction d’appareils ou dans la recherche d’un coup de main) il s’agirait de lier deux ateliers, d’organiser leurs changements réciproques. L’interaction s’oppose à l’échange, elle place le sujet en assujettissement avec le milieu : le pilote ne conduit même pas une construction à multiples facteurs, y a-t-il un pilote ?

Nous ne voyons dans ce jardin que le travail qui rend possible un résultat incertain : il ne s’agit pas d’y cultiver ses légumes, ses fleurs et ses fruitiers mais d’araser, de transporter, de construire et de somnoler et de rêver. Ce sont des environnements, des vies et une société qui s’y produisent. Comment s’y font les choses et les êtres, par la polytechnique de la peinture et du jardinage plutôt que par la collaboration visée du peintre et du jardinier ?

La peinture ne vise pas à transcrire le jardin, elle ne s’immisce pas dans les affaires du jardinier : elle se met en retrait sur les murs de la clôture (bien qu’on suppose qu’à travers elle c’est l’œil du peintre qui est magiquement observateur de ce qui se passe là) et le jardin évolue de son côté, tous deux reçoivent les facteurs atmosphériques : soleil, pluie, vent ; ce qui fait qu’ils paraissent finalement se ressembler.

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